Semer la paix dans les cœurs, et non la peur
par Colette Carr | 30 mai 2024 |
Il y a quelques semaines, Loren Seibold a écrit un article sur La fièvre de l’éclipse, et cela m’a poussée à me demander: pourquoi tant d’entre nous continuent à attendre que Dieu fasse quelque chose de sensationnel? Pourquoi cherchons-nous Dieu dans les choses extraordinaires?
Les voies de Dieu ne sont pas les nôtres – et c’est plutôt évident lorsque nous considérons, dans la Bible, les interactions de Dieu avec les êtres humains.
Ninive
Après avoir prédit la destruction de Ninive, Jonas est plutôt déçu lorsque Dieu n’anéantit pas aussitôt tous les Ninivites. Il aurait aimé voir des boules de feu tomber du ciel.
Traditionnellement, les adventistes ont fait, quant à l’avenir, des prédictions qui inspirent la peur. Comme Jonas, certains d’entre nous s’expriment comme s’ils souhaiteraient voir tomber des boules de feu – surtout s’ils ont pu les prédire! Et puisque nous en savons plus que tout le monde, les autres devraient, par conséquent, rejoindre nos rangs.
Nous prêchons que «l’amour parfait chasse la peur». Pourquoi donc sommes-nous si enclins à décrire un avenir effrayant? Chaque catastrophe naturelle, chaque élection est l’occasion pour nous de rappeler à tous que quelque chose de terrible est sur le point de se produire. Peut-être faisons-nous toutes sortes de prédictions dans l’espoir que l’une d’elles se révèlera exacte?
Si nous étions honnêtes, nous admettrions que nous, plus que Dieu, souhaitons que les pécheurs obtiennent ce qu’ils méritent. Nous voulons pouvoir déclarer: «Vous voyez? On vous l’avait bien dit! Dieu est d’accord avec nous!»
Mais, comme pour Jonas, tout en prédisant la destruction, Dieu répond avec patience, compréhension et pardon.
Changement de cœur
Lorsque nous prédisons des évènements effrayants pour la fin des temps, nous devrions nous rendre compte que c’est nous qui avons besoin d’un changement de cœur. Nous devrions désirer découvrir en nous l’amour profond de Dieu pour tous les êtres humains, que nous pensions qu’ils soient bons ou mauvais. Nos cœurs devraient se briser à l’idée que l’un d’eux soit perdu.
Si nous voulons vraiment que notre cœur ressemble à celui de Dieu, nous demanderons à Dieu de nous aider à aimer chaque personne sincèrement et entièrement, où qu’elle se trouve sur son chemin de vie. C’est ainsi que Dieu nous aime.
Le père n’a pas envoyé son fils travailler dans les champs avec les serviteurs, même si c’était ce que le jeune homme avait demandé, et ce que son frère aîné souhaitait voir se réaliser. Pouvons-nous imaginer le sentiment d’autosatisfaction et de supériorité que le fils aîné aurait alors ressenti? Pouvons-nous imaginer son sourire narquois alors qu’il passe à côté de son misérable jeune frère – lui, dans ses vêtements propres et coûteux, et son cadet, un simple serviteur?
Ce n’est pas une belle image. Pourtant, l’empressement avec lequel nous parlons de la destruction des pécheurs force Dieu à jouer ce triste rôle.
N’oublions pas que Dieu ne fera jamais ce qui va à l’encontre de son cœur. La vérité, c’est que Dieu est tout aussi patient avec nous et notre suffisance qu’avec tout autre pécheur.
Dieu travaille en secret
L’une des plus belles histoires de l’Ancien Testament est celle de l’interaction de Dieu avec Elie dans 1 Rois 19.11-13:
L’Eternel dit: «Sors et tiens-toi sur la montagne devant l’Eternel, et l’Eternel va passer!» Devant l’Eternel, il y eut un vent fort et violent qui déchirait les montagnes et brisait les rochers; l’Eternel n’était pas dans le vent. Après le vent, il y eut un tremblement de terre; l’Eternel n’était pas dans le tremblement de terre. Après le tremblement de terre, il y eut un feu; l’Eternel n’était pas dans le feu. Après le feu, il y eut un murmure doux et léger. Quand il l’entendit, Elie s’enveloppa le visage de son manteau, sortit et se tint à l’entrée de la grotte. Et voici qu’une voix lui fit entendre ces paroles: «Que fais-tu ici, Elie?»
Dieu ne se trouve pas dans l’ouragan qui brise les rochers, ni dans le tremblement de terre qui amène le chaos, ni dans le feu qui détruit tout dans son sillage. Dieu est dans un murmure doux et léger, une petite voix, un souffle.
De nombreuses autres métaphores décrivent le règne de Dieu de la même manière. Jésus dit que le royaume de Dieu est comme une graine dans la terre, le levain dans une boule de pâte, le sel dans un plat – toutes des choses qui disparaissent quand elles font leur travail! Dieu aime travailler incognito, au travers de personnes qui ne proclament pas la colère et le jugement de Dieu mais qui travaillent secrètement et sereinement pour Dieu tout en pratiquant la justice, en vivant dans l’humilité et en prenant plaisir à la bonté.
Le royaume de Dieu est également lumière – quelque chose qui n’est pas caché – mais cette lumière donne la vie et elle éclaire, elle ne paralyse pas les gens de peur et ne les aveugle pas de sa colère.
Et rappelons-nous que lorsqu’il était temps d’entrer directement dans notre monde, comment Dieu a-t-il choisi de venir? Tel un bébé, caché dans le corps d’une jeune fille, au sein d’un peuple insignifiant et en territoire occupé.
Encore une fois, dans le secret.
Mais ne nous y trompons pas: discrètement ne signifie pas de façon lâche ou inefficace. Il n’y avait certainement aucune lâcheté en Jésus. Et en regardant l’histoire, qui peut nier l’impact de sa vie sur le monde? L’histoire du christianisme a connu de nombreux vilains détours, mais la vérité de l’amour et de la patience de Dieu a toujours survécu, et elle continuera de le faire.
S’il te plaît, change nos cœurs
Contrairement au message véhiculé par notre eschatologie en colère, Dieu ne veut pas que les pécheurs périssent. Si tel était le cas, nous aurions tous disparus depuis longtemps. Dieu est lent à la colère. Nous pas. Le moins que nous puissions faire, c’est de reconnaître cela et de demander à Dieu de changer nos cœurs.
Dieu ne sera jamais forcé à faire tomber le feu du ciel. Par qui que ce soit. Dieu attend patiemment que nos cœurs deviennent aussi patients, aussi aimants et aussi transformateurs que le sien.
Voici les seules boules de feu que Dieu veut envoyer dans le monde: des brasiers de compassion, de patience et d’amour. Et pas seulement une par-ci et une par-là! Des milliards! Par l’intermédiaire de tous ceux qui désirent vraiment, selon les paroles d’Ezéchiel, un cœur de chair.
C’est ce pour quoi Jésus priait lorsqu’il disait: «Que ton règne vienne.» Le règne d’amour de Dieu, dans nos vies, aujourd’hui et demain, c’est le royaume de Dieu.
Je ne dis pas que Dieu ne fait jamais rien de sensationnel. Je crois que lorsque Dieu répare des relations et transforme des cœurs, c’est extraordinaire. Ces miracles ne seront pas retransmis à la télévision ni ne feront la une des journaux, mais ils se produisent. Tout le temps et partout.
«J’ai une récrimination»
Il est peut-être temps pour nous, adventistes, de mettre de côté nos attentes quant à la vengeance divine. Parlons, au contraire, de la belle vision et de la réalité du royaume de Dieu, ici et maintenant. Nous supposons trop souvent que celui-ci n’existe que dans le futur, lorsque Jésus reviendra.
Mais c’est une vision incorrecte. Les métaphores de la graine et du levain attestent que Dieu est à l’œuvre dans le monde en ce moment-même. Aux côtés de Jésus, prions pour que ce règne vienne et prêchons ce royaume où tous les enfants de Dieu ne font qu’un.
Le commentaire suivant (tiré de The Seventh Story – Us,Them, & the End of Violence de Gareth Higgins et Brian D. McLaren) m’a fait sourire:
Comme le dit le rabbin Michael Lerner, Martin Luther King n’est pas connu pour un discours intitulé «J’ai une récrimination». Bien sûr, il s’est prononcé contre les injustices de son temps (la principale d’entre elles étant ce qu’il appelait les triplets maléfiques du racisme, du militarisme et du matérialisme), mais il a également décrit une vision pour parvenir à les surmonter (pp. 127-128).
Les auteurs poursuivent:
La menace que représente le monde de nos jours est évoquée chaque fois que nous ouvrons notre ordinateur ou que nous allumons notre téléphone. La terreur vit dans notre poche, dans un appareil qui ne fait aucune différence entre la sagesse, l’information, la propagande et la tromperie. La bonne nouvelle, c’est que nous pouvons apprendre plus de choses que jamais, nous pouvons nous connecter plus vite et apprendre à nous guérir…. Le défi – et l’invitation – c’est d’apprendre aussi à éditer ce que nous y trouvons. Personne ne le fera à notre place; en effet, c’est dans l’intérêt du complexe militaire et industriel et celui du divertissement que nous soyons inconscients et que nous cliquions sur autant de liens que possible (p. 130).
L’Abbé Pierre, un prêtre français qui a dédié sa vie aux pauvres, aux sans-abris et aux réfugiés a un jour déclaré:
Le mal ou ce qui cloche est beaucoup plus médiatique que le bien. Cela se comprend mais pose un véritable problème de société: à force d’entendre parler de ce qui ne va pas, on finit par oublier que partout les forces du bien sont à l’œuvre. Or, ces manifestations de la bonté humaine ont besoin, elles aussi, d’être médiatisées: elles auraient une force d’entraînement considérable, car l’exemple est contagieux.
En un mot, c’est mieux de parler de Dieu que du diable.
Planter des fleurs
Au début de l’année, j’ai vu un dessin humoristique qui m’a marquée. Il représentait un homme inquiet qui demandait à son amie, jardinière, si elle avait peur de ce que cette nouvelle année apporterait car, selon lui et bien d’autres, le monde était fou. Ce à quoi elle a répondu: «Je pense qu’il va m’apporter des fleurs.» Surpris, son ami a répondu: «Vraiment? Pourquoi?» «Parce que je plante des fleurs.»
Equation simple. Logique.
Suivons son exemple. Arrêtons de répandre l’anxiété et le désespoir. Plantons au contraire l’espoir, la confiance et une foi profondément enracinée dans un Dieu bon et aimant. Si nous faisons cela, nous serons des artisans de paix et non des semeurs de discorde.
Ces idées s’épanouiront certainement, telles des fleurs dans un monde assoiffé et troublé.
Pourquoi?
Parce que Dieu a promis d’arroser.
Colette Carr écrit depuis Anchorage où elle explore les différents visages de l’Alaska. Parmi plusieurs autres activités créatives et éducatives, elle traduit des articles de l’anglais vers le français pour Adventist Today, et elle a une requête à vous faire: partageriez-vous ce lien avec toutes les personnes qui, selon vous, apprécieraient les articles en français de ce site web? Nous serions ravis d’agrandir le groupe de nos lecteurs francophones. Merci d’avance! La version anglaise de cet article est parue le 17 mai 2023 sur le site d’AdventistToday.
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